La carte de l’aventure
Cet article est la conclusion des mes 12 jours en solitaire sur mon vélo à travers l’île du sud de la Nouvelle-Zélande. Je vous recommande de commencer par l’article « pourquoi » qui explique comment j’en suis arrivé à réaliser cette folle aventure, sans préparation, sans expérience et sans motivation !
J’ai pris le temps chaque soir de mettre par écrit les choses qui se sont passées sur la route et dans mon esprit :
– Jour 0 et 1
– Jour 2 et 3
– Jour 4 et 5
– Jour 6 et 7
– Jour 8 « une journée en enfer »
– Jour 9 et 10
– Jour 11 et 12
QUELQUES CHIFFRES POUR COMMENCER
Performances physiques
– 12 jours à vélo (+1 jour off) 52h24 à pédaler
– 1100km au total, soit une moyenne de 90km par jour
– 8000m de dénivelé soit 30 fois la tour Eiffel
– 60 000 calories brûlées et 60 litres d’eau bus
Évolution du corps
Je viens de réaliser un DEXA scan à mon retour, soit 1 mois après le premier fait juste avant mon départ pour la Nouvelle-Zélande. Je m’attendais à une grosse variation, mais mon corps s’est parfaitement adapté au challenge physique. C’est assez fou…
– J’ai perdu 1,8kgs dont une bonne partie en muscle.
– %BodyFat > de 15% à 15,4%
– %LeanMass > de 18,9% à 18,4%
– Aucune variation de graisse ou muscle dans les jambes (très bizarrement…)
+60 000 calories brulées sur 2 semaines. Beaucoup plus que ma semaine inactive pendant « vipassana » (Fév 17) mais pas beaucoup plus qu’une semaine « normale » d’entrainement ironman (Fév 24).
Location vélo
(953 dollars)
Je suis passé par le magasin Natural High (Christchurch). Au final, le vélo n’était pas du tout adapté à mes besoins. Il s’agit d’un vélo pour se « balader à la cool » et non faire 90km par jour. En contre-partie, le prix était pas très élevé.
Vélo + 2 paniers arrières + cadenas + kit de réparation
= 953$ pour 15 jours, soit 63$ par jour
Logement
(1362 dollars)
– 3 airbnbs pour un total de 287$ (95$ / nuit)
(nuit 1 / nuit 7 / nuit 8)
– 8 hostel/motels pour un total de 1075$ (134$ / nuit)
(nuit 2 / nuit 3 / nuit 4 / nuit 5 / nuit 6 / nuit 9 / nuit 10 / nuit 11)
Nourriture et suppléments
(1125 dollars)
Lors du 5ème jour, je me suis rendu compte d’une perte de poids « visible » dans le miroir. Mon corps n’était pas prêt à encaisser une consommation de +5000 calories par jour. J’ai réussi à corriger le tir en doublant le nombre de calories que je consommais (exemple).
À noter que je me suis fait vraiment plaisir lors de mon jour off à Christchurch et mon arrivée à Queenstown le dernier jour. Si j’étais resté sur riz-sauce-tomate pendant ces 2 jours, je serais sous la barre des 1000 dollars.
BILAN DEPENSES
(3440 dollars)
– Location vélo > 953 dollars
– Logement > 1362 dollars
– Nourriture et suppléments > 1125 dollars
>> Total : 3440 dollars australien / 1900 euros, soit environ 125 euros par jour en moyenne tout compris.
À noter que j’ai fait le choix de ne pas camper chaque nuit, mais d’avoir une chambre avec un lit. Cela représente un coup supplémentaire et des contraintes (par exemple tu peux pas t’arrêter à mi-chemin ou n’importe ou). Mais pour ma première fois en solitaire, je préférais avoir le confort chaque nuit d’un bon lit et d’une bonne douche.
CE QUE J’AI APPRIS
Pour commencer, j’aimerais remercier mes amis proches qui m’ont soutenu au quotidien avec leurs messages. Ils se reconnaitront, merci à vous <3
Je suis ravi que l’aventure soit terminée et heureux que tout se soit bien passé. Pas de problème technique, pas de blessure et surtout pas d’abandon ! Certes, je ne suis pas allé jusqu’au 1500km en 15 jours prévus, mais je termine avec un honorable 1100km en 12 jours. Ce qui me donne très envie de recommencer un jour MAIS avec un vélo adapté et quelqu’un à mes côtés !
En prenant du recul, je commence à me rendre petit à petit de la performance réalisée, tant sur le plan physique que mental. Je réalise à quel point cette aventure valait le coup, à quel point je ressors de cette expérience fier et grandi.
Apprendre à voyager différemment.
Je n’avais jamais voyager autrement qu’en voiture de location (et essentiellement dans les grandes villes). Être en vélo est une expérience complètement différente. Tout est plus lent qu’en voiture, vous avez vraiment le temps d’observer le paysage. Vous ne pouvez pas « rusher » d’un endroit à l’autre en faisant 100km par-ci et 200km par-là.
Tous les chemins sont accessibles, que cela soit de la route goudronnée ou un trail sinueux en pleine forêt. Qui dit « bike-packer », dit « matériel de camping ». Ce n’était pas mon cas, mais j’ai croisé nombreux bike-packer qui avait cette liberté de ne pas savoir où ils allaient dormir le soir même.
Être à vélo, c’est cool
Les voitures vous klaxonnent et les gens vous disent bravo. Il y a quelque chose de « cool » à être un(e) bike-packeur. Je pense que c’est lié au fait que les gens savent à quel point on souffre sur notre vélo chaque jour. Et ils n’ont pas tord !
Je me souviens, moi aussi, avoir eu beaucoup de respect pour ces voyageurs à deux roues, que je voyais souvent sur le bord de la route, chargés comme des mulets, les visage fatigués mais avec toujours avec le sourire.
L’univers te renvoie ce que tu lui donnes
Je suis convaincu que notre monde est un mélange d’énergie. Si tu es positif et que tu vois le bien dans les choses, alors tu recevras en retour de l’énergie positive. J’essaie maintenant de partir du principe que chacun essaie de faire son mieux dans la vie, même dans les situations désagréables qu’on a tous connu (à l’aéroport ou au supermarché).
J’ai vécu un exemple parlant lors de mon aventure. À notre arrivée au YHA Hostel à Franz Josef, le réceptionniste me demande une pièce d’identité pour s’assurer que je suis majeur. Il se doute bien que j’ai plus de 18 ans, il fait juste son job avec un point de contrôle à respecter avant de me donner ma clé. J’aurai pu m’énerver en grognant contre cette « règle à la con ». Ce que se passa l’instant d’après…
Lorsque j’appelle Raphaël, qui attendait à l’extérieur, pour lui demander sa pièce d’identité. Il se braque d’un coup et son sang ne fait qu’un tour. Il commence à s’en prendre au réceptionniste pensant qu’il y avait un délit de faciès. La discussion monte dans les tours. Au final, j’arrive à calmer la situation et j’explique à Raphaël que le réceptionniste fait « juste » son job.
Résultat : une situation désagréable pour tout le monde du stress pour rien.
La solidarité entre bike-packeurs
En voiture, on ne se parlent pas. En moto, on se fait des signes de la main sur la route. En vélo, c’est complètement différent !
À chaque fois que j’ai croisé une autre personne en vélo, dans un camping ou à un café, il y a toujours eu un échange de mots. C’est souvent même une vraie discussion où l’on s’assure que l’autre est « okay » et qu’il a tout ce qu’il faut pour son aventure.
Ca change de l’esprit auto-centré caractéristique des endroits « branchés ». Enfin, selon mon humble avis.
En vélo, tu es « le moteur »
En voiture, tout est facile. Tu as la clim, la musique, un toit et surtout tu peux faire les distances que tu veux. En vélo, tu es « le moteur ». Tu es limité par tes propres capacités. Tu as donc plein de paramètres à prendre en compte comme la pluie, le vent (de face!) ou encore ta forme physique.
J’ai découvert au bout de 5 jours que la nutrition joue un rôle important dans l’aventure. Négliger cette partie revient à partir sans avoir une jauge du niveau d’essence.
Faire du sport sans musique
Si tu es amateur de sport d’endurance (triathlon, marathon, ultra-trail…) tu dois voir exactement de quoi je parles. Les entrainements consistent à avaler des kilomètres et des kilomètres, souvent pendant plusieurs heures. Comme tout le monde, j’ai commencé à courir avec de la musique dans les oreilles. Puis rapidement, c’est devenu une drogue, un boosteur psychologique. Impossible de m’en passer.
Dès le premier jour de mon bike-trip, je me devais d’être concentré sur plein de détails, la route et les voitures. Donc pas de musique. Puis le premier jour est passé. Puis le deuxième. Et petit à petit, j’ai commencé à découvrir une autre façon de faire du sport, le sport « sans musique ». Je me suis concentré sur ma respiration et les sensations dans mon corps. Puis par moment, je me plongeais dans l’instant présent, les yeux rivés sur le bitume qui défilait devant mes yeux.
Au moment où j’écris ces lignes, j’ai repris mon premier footing à Sydney (sans musique). C’est tellement mieux d’être synchronisé avec ce qui se passe dans son corps.
Un voyage à l’intérieur de soi-même
Le plus marquant pour moi de cette aventure reste l’aspect « mental » de l’aventure. J’étais à mille lieux de réaliser à quel point, être 6 à 10h par jour sur son vélo, devient un véritable voyage à l’intérieur de soi-même. Certes, tu continues à admirer le paysage, mais tu rentre petit à petit dans une « médiation sous stéroide« . Cela s’applique bien sûr à mon expérience, si tu roules que 2 ou 3 heures par jour à la cool, c’est différent.
La souffrance physique vient décupler la puissance méditative de l’expérience. Au bout de 4 ou 5 jours sur le vélo, tout est douloureux et chaque kilomètre te paraît une éternité.
L’ensemble te force à être dans le moment présent, à regarder devant toi la route qui défile devant ta roue et à ne penser à rien d’autre.
« Seul ceux qui vont trop loin, peuvent savoir jusqu’où ils peuvent aller. »
Je pensais être capable (lié à mon manque d’expérience sûrement) d’endurer physiquement cette aventure, mais j’étais loin de me rendre compte du challenge mental. Il y a encore quelques semaines, j’aurai situé ma propre limite très loin de tout cela.
Je me rends compte maintenant que l’on peut faire plus qu’on le croit. Quand ton mental te dit que tu ne peux plus, en vrai, il te reste encore une bonne dose d’énergie.
J’ai appris aussi que la peur existe uniquement dans notre esprit. C’est une projection de notre mental dans un futur qui n’a pas encore lieu.
MOT DE LA FIN
On m’a demandé plusieurs fois pendant mon aventure : « mais pourquoi tu fais tout ça ? ».
Je le fais avant tout pour moi, pour me challenger et affronter mes peurs. Tous ces challenges depuis 4 ans, de monter sur un ring pour un combat de boxe à lire un livre toutes les semaines en passant par apprendre à nager en 3 mois pour réaliser un triathlon olympique, ont été une véritable « école de la vie » pour moi.
J’ai répondu à nombreuses de mes questions, réglé de nombreux sujets me concernant, dont la majorité avec lesquels je me battais depuis des années.
La deuxième question qui arrive généralement juste après : « Tu te sens obligé de tout poster sur les réseaux sociaux ? ». Oui, pour deux raisons évidentes :
La première, pour inspirer d’autres personnes à partir à la conquête de leurs rêves. Dès lors qu’on commence à accomplir des challenges personnelles (petits ou grands), cela procure une réelle énergie positive, à la fois pour soi et pour les gens qui nous entourent. Si j’arrive à inspirer rien qu’une seule personne, cela me suffit. Je ne fais pas cela pour « faire des vues ».
La deuxième, pour trouver une source supplémentaire de motivation. Je reçois chaque jour des messages d’encouragements qui sont un vrai boost d’énergie dans les moments difficiles. Cela me permet aussi de recevoir régulièrement des conseils pratiques ou idées pour réussir au mieux mes challenges (ex : vipassana)
J’espère que vous avez pris autant de plaisir à lire mon histoire, que j’ai pris du plaisir à l’écrire. Si vous avez des questions, n’hésitez surtout pas à venir mes les poser sur instagram.