Au sommaire :
- Introduction
- 1er janvier au 1er mai : 1420km en 120 jours
- 00km à 30km : que du bonheur
- 30km à 50km : jusqu’ici tout va bien
- 50km à 70km : premier pas dans l’inconnu
- 70km à 95km : « If you’re going through hell, keep going. »
- 95km à 100km : voyage au bout de soi-même
- 100km + 30min : la peur de ma vie
- Conclusion ? Prochain challenge ?
J’ai beau relire le titre de cet article, je n’en reviens toujours pas. Dimanche 1er mai 2022, j’ai couru 100km, en solitaire à Lisbonne, en 12 heures et 35 minutes. Je suis passé par tellement d’émotions, j’ai tellement de choses à raconter, que je sais pas où commencer.
Peut être tout simplement par vous redonner le lien de la newsletter qui explique l’origine du challenge : “Pourquoi (et comment) je vais courir 100km le 100ème jour de l’année”.
Et ensuite, par le plus facile : DATA DATA DATA !
- 120 jours d’entrainement (1er janvier – 1 mai)
- 1420 kilomètres parcourus (11,8 kilomètres par jour)
- 1.860.000 pas effectués (15.500 pas par jour)
- 390.000 calories brulées (3.250 calories par jour)
- 945 heures de sommeil (8 heures par nuit)
- 41.7 de rythme cardiaque moyen au repos (sur l’ensemble de la prépa)
- Record personnel au semi-marathon à Austin en 1h41m21s (lien strava)
- Record personnel au 15km, au 10miles et 20 km en 1h36 (lien strava)
- Record personnel au 1km et 5km en 22 minutes (lien strava)
- Mon premier 20 miles en 2h53 (lien strava) et premier 50km (lien strava)
- Mon premier marathon en solo en 4h13 (lien strava)
- Et 4 kilos perdus le jour de la course !
Comme vous pouvez le voir, les chiffres donnent le tournis (disponible sous format excel ici). Et encore plus avec les 2 graphiques ci-dessous.
- Le premier graphique montre l’évolution du nombre de kilomètres par semaine et la dépense calorique moyenne. On voit tout de suite que le “kilométrage” monte très vite à cause du temps imparti, avec un pic dès la 8ème semaine à 100km.
- On remarque une dépense énergétique moyenne stable malgré les grandes variations de distances parcourues. Que je cours 40km ou 105km par semaine, je reste sur une moyenne proche de 3200 calories brûlées par jour.
- Le deuxième graphique met en avant mon super pouvoir : dormir n’importe où / n’importe quand. Réussir à maintenir 8 heures de sommeil effectif par nuit est sûrement la principale raison de mon absence de blessures (et capacité à endurer l’effort)
- On remarque une légère augmentation de ma fréquence cardiaque au repos : 40.2 en janvier à 49.3 en mars puis 45.1 en avril. Cela peut s’expliquer par la nécessité de mon corps à “augmenter” sa capacité de récupération surtout pendant les phases de sommeil.
Rentrons maintenant dans le vif du sujet. Je vais aborder la course étape par étape, sensations par sensations, sous forme de grands chapitres. Ces 100km ont été plus qu’une aventure, un véritable voyage au bout de moi-même. En réfléchissant à la structure de cet article, je vois 5 grands chapitres pour vous raconter l’histoire.
Mais avant de rentrer dans la course, je vous propose un petit paragraphe sur la phase d’entraînement. Qu’on se le dise, la course et la consécration à la fin sont la partie immergée de l’iceberg (« ce que l’on voit”), mais le plus gros du travail est les 4 mois qui ont précédé !
1er janvier au 1er mai : 1420km en 120 jours
Le plus important n’est pas la course en elle-même, mais toute la phase de préparation qui permet de se lancer confiant à l’idée de réussir, le jour J à 06h00 du matin. Avant de savoir courir 100km en une fois, il y a de nombreuses étapes à valider. Que je vais synthétiser au mieux dans ce chapitre
1 – Rendre l’objectif mesurable (et normé dans le temps)
Comme on ne change pas une formule qui marche à tous les coups, j’ai appliqué une nouvelle fois “ma méthode pour réaliser tous vos rêves 10x plus vite que tout le monde” (publiée en avril 2021). La première étape consiste à rendre mesurable l’objectif.
Lorsque je suis tombé sur cette vidéo (lien ici) qui a fait naître en moi l’envie de devenir “ultra-runner”, je suis facilement arrivé à l’objectif (un poil fou mais sinon c’est pas drôle) mesurable suivant : “réussir à courir 100km en une journée le 100ème jour de l’année.” (soit le 10 avril)
2 – Prendre un coach
J’ai ensuite pris un coach (Maxime Lopes) pour m’assurer de la faisabilité du challenge, partir dans la bonne direction et éviter le maximum d’erreurs. Malgré ses doutes sur ma capacité à réussir cet exploit en 100 jours, il a décidé de m’accompagner avec un plan d’entrainement ambitieux (faire rentrer 9 mois dans 3). Pour reprendre ses mots : “c’est faisable, mais accroche toi bien Maxime car il va falloir y aller fort… et dès demain.”
Le seul bémol sur l’ensemble du coaching, qui s’est dévoilé vers la fin de la préparation, est l’absence “d’expérience par lui-même” sur une course de 100km. À l’approche de la course, j’ai senti qu’il aurait été bon d’avoir un coach “qui l’a déjà fait”. Mais à juste titre, il m’a fait remarqué qu’il y a peu de demandes sur des challenges de cette envergure et que la majorité des personnes assez folles pour se lancer sur une course de 100km sont souvent bien expérimentées sur le sujet. Donc peu de demandes = peu de coachs “100km”. Make sense.
3 – Créer un système “sans motivation”
Ensuite ce fût aussi bête que méchant. Ne pas regarder le sommet de la montagne (sous peine de se cristalliser) mais décomposer l’objectif dans des étapes si petites que vous n’aurez pas besoin de motivation pour y arriver.
Avant de courir 100km, il faut franchir le cap de la course de 50km. Mais avant de courir 50km, il faut se tester sur 30km. Et pour se tester sereinement sur 30km, il faut déjà (rapidement) atteindre un volume hebdomadaire à 85/90km.
Et pour courir 90km par semaine, en gardant un jour de repos, cela fait une moyenne de 15km par jour. Si on part sur 10km du mardi au vendredi, il reste donc 2x25km à faire dans le weekend. Oui, ça fait beaucoup.
Mais comme pour mes 100 derniers rêves réalisés, petit à petit, un pas à la fois, l’impossible devient possible. Je suis parti sur 45km la première semaine, sans forcer, pour me mettre en confiance puis on a enchainé sur 75km. Au bout d’un mois, le 75km me paraissait normal, on a donc poussé à 85km. Puis 90km. Puis 100km en semaine 8 !
4 – Savoir ralentir mais ne pas s’arrêter
Il faut du temps pour créer une bonne habitude, mais 2 jours pour la perdre. Pour les challenges sportifs, c’est la même chose. Vous avez le droit de trouver cela difficile ou de décaler la ligne d’arrivée. Mais vous n’avez pas le droit de vous arrêter. S’il le faut, réduisez la marche encore et encore, mais continuez de faire un pas chaque jour vers l’objectif.
J’ai vécu trois moments très durs mentalement :
- le 21 mars (lien strava) : 80ème jour de la préparation, mon corps s’arrête d’un coup, comme si on avait coupé le courant, au bout de 5km, un lundi matin à Austin. J’ai vu mon corps enclencher le mode “alerte danger” et mon esprit se concentrer uniquement sur le chemin le plus court pour rentrer à la maison. Assez flippant, je dois l’avouer.
- la semaine post-50km (lien strava) : la fin de mon 50km fût si violente et désagréable, à tous les niveaux, qu’il me faudra 4 jours complets pour m’en remettre. Je me suis obligé à faire un peu de corde à sauter pour garder une certaine tension et ne pas tout lâcher. Je suis reparti avec un 8km, puis 10km, puis 12km…
- Les 10 minutes chez moi après avoir fini mes 100km, mais je vous en parle en conclusion.
Avec les 4 jours de décalage sur le planning prévu et mon passage imprévu à Oaxaca début avril, nous avons décidé avec mon coach qu’il était plus sain de décaler la course du 10 avril au 1er mai, pour le temps de retrouver mes esprits mais surtout pour revenir à Lisbonne (avec sa température favorable et ses parcours tout plats).
5 – Success = 95% training + 5% “showing-up”
Je ne peux que confirmer cet adage. Lors la semaine précédant la course, appelée “deload-week”, où l’on décharge complètement le volume pour “faire du jus”, j’ai réalisé que j’étais prêt. La veille du départ, je me sentais capable de courir 100km. L’impossible (4 mois avant) était enfin devenu possible.
Il est évident qu’une course de 100km, ça se prépare physiquement, mais cela se prépare aussi techniquement. Surtout lorsque tu es en solitaire et que ton appartement est ton seul point de ravitaillement.
Pour vous donner un ordre d’idée, sur la journée, j’ai brulée 10.000 calories, bu 14 litres d’eau et perdu 4kgs. Pour maintenir mon énergie pendant 12 heures d’effort, la nutrition et l’hydration doivent être gérer avec grande précision : manger toutes les 20 minutes, boire toutes les 10 minutes, avoir 60/70gr de glucides par heure dans le ventre, recharger tous les nutriments et macro-nutriments en continu…
Dernier détail : le but étant de finir avant minuit, je me suis mis un départ à 06h00 du matin, pour être sûr d’avoir le temps, sans perdre trop de sommeil non plus. Succès à ce niveau d’ailleurs en 6h52 de sommeil effectif la veille du départ.
00km à 30km : que du bonheur
–00h30 : Réveil à 05h25 du matin pour avoir une bonne demi-heure pour se préparer. L’objectif est simple : manger 4 énormes tartines de beurre de cacahuète / confiture de framboise, s’habiller et prendre un café bien noir pour s’assurer une pause toilette avant le départ.
00h00 : Mon premier objectif de la journée est atteint : partir pile à 06h00. C’est un détail, mais ça me met directement de bonne humeur. Je vois que la température est agréable et la luminosité point déjà le bout de son nez.
00h30 : je croise les sorties des boites de nuit le long de la piste cyclable. Je rigole du regard complètement ébahi de ces personnes ivres ou droguées qui me regardent comme si j’étais un extraterrestre. En vrai, je les comprends !
01h30 : Après 90min et 15km, j’arrive sans aucun problème au magnifique pont Vasco de Gama. Dès la sortie du centre de Lisbonne, je ne vais croiser quasiment personne sur mon chemin. Demi-tour juste après le pont, pour atteindre le premier checkpoint de la journée.
03h07 : Retour à la maison pour changer de tenue, remplir mes gourdes et recharger mes poches en barres et gels énergétiques. Sur les conseils de mon coach, j’en profite aussi pour changer de paire de chaussures. Au bout de 3 heures, l’amortie est complètement abimée sur la chaussure, donc le fait d’alterner, permet à la chaussure de récupérer sa forme initiale.
03h10 : En descendant les 10 marches qui séparent mon appartement de la rue, un moment de lucidité transverse mon esprit, je réalise l’espace d’un instant dans quoi je me suis embarqué et à quel point la journée va être longue…
03h12 : Une inconnue, Maria, a vu mon post sur instagram et s’est proposée pour m’accompagner sur 5km avant l’heure du déjeuner. Elle m’attend à la sortie de chez moi. Rapide échange pour faire connaissance, pendant que je finis de manger mon sandwich peanut butter / confiture, et on se remet doucement à courir en direction de Belem.
30km à 50km : jusqu’ici tout va bien
03h36 : Maria semble fatiguée au bout de 3km et décide de marcher. Mon objectif est différent : je souhaite garder mon rythme le plus longtemps possible, avant que les crampes commencent à drastiquement diminuer ma vitesse moyenne. Je lui propose de marcher pendant que je vais continue pour faire demi-tour à Belem.
03h55 : Je récupère Maria sur le chemin du retour qui accepte de m’accompagner jusqu’au 40ème kilomètre. Le fait d’avoir de la discussion procure deux avantages non négligeables : mon esprit est concentré sur autre chose que mes sensations physiques et cela m’oblige à garder un rythme léger (et constant) pour pouvoir parler sans être essoufflé.
04h17: I reach the 40km without too much difficulty, nor any problem on the horizon. This makes me feel better, because I was afraid of reliving the 50km race in Austin, where all the lights went in the red at kilometer 40. The heat is gradually rising and I am back to running by myself. My speed has decreased slightly but is still decent at 6:25/km. Still no cramps in the legs. We continue smiling.
04h31 : nouveau checkpoint important dans ma vie de coureur : un 2ème marathon à mon palmarès ! Un élan de fierté s’empare de moi en réalisant que ces 42km, un exploit pour nombreux, est « simplement » la moitié de ce que je vais faire aujourd’hui. Ce challenge m’a littéralement fait changer de catégorie.
05h30 : retour à la maison pour le 2ème checkpoint de la journée tous juste avant midi comme prévu au 50ème kilomètre. C’est un moment important, car je rentre maintenant dans l’inconnu. Je n’ai aucune idée de comment mon corps va réagir à partir de là. Je remarque qu’il devient très dur de continuer à manger. Mon estomac se referme rien qu’à l’odeur des barres CLIF que j’enchaine depuis le lever du soleil. Premier voyant qui clignote sur le tableau de bord…
50km à 70km : premier pas dans l’inconnu
05h41 : Bonne nouvelle ! Sam, un ami sur Lisbonne, propose de me rejoindre à Praça do Comércio avec sa femme pour m’accompagner sur 10/15 km dans 1 heure. Parfait, je pars en direction de la place, que je vais attendre 20min plus tard.
06h20 : 56km au compteur, je fais demi-tour pour rejoindre Sam. Si mes calculs sont bons, je serai sur la place au kilomètre 60.
06h47 : Je retrouve Sam et sa femme avec comme prévu, avec 60km au compteur. Ils sont plein d’énergie et tout sourire. J’en profite pour me laisser porter et suivre leurs pas, ce qui me donne un nouvelle élan ! Ma course devient plus saccadée au fur et à mesure que la journée avance. Je cours environ 2 minutes puis 1 minute. Le soleil est au zénith, il fait très chaud. Je remarque à quel point je perds du sel, mon tshirt noir est recouvert de taches blanches (cf photo).
07h49 : On atteint une nouvelle fois Belem, avec cette fois-ci 68km au compteur. On fait demi-tour devant le magnifique monument “Padrão dos Descobrimentos”. Ma vitesse moyenne se rapproche doucement des 7 minutes au kilomètre. Dans les faits, je tourne facilement autour de 9 minutes par kilomètre. C’est un vrai dilemme sur le sport d’endurance : si tu vas trop vite, tu peux exploser en vol. Mais si tu vas trop lentement, ça peut rajouter des heures au compteur augmentant le risque d’abandonner.
08h08 : Je franchis la barre des 70km, toujours en compagnie de mes deux acolytes. Coup d’oeil rapide à ma montre, cela fait maintenant 8 heures que je cours. Je n’en reviens pas. Je décide de les laisser continuer pour repasser par chez moi faire un arrêt aux stands. J’ai le pressentiment qu’on va “enfin” rentrer dans le dur…
70km à 95km : « If you’re going through hell, keep going. »
08h39 : Je suis de retour chez moi pour le 3ème checkpoint. Je recharge les gourdes et mes poches en barres énergétique et je change une dernière fois de chaussures. Histoire de me faire plaisir, je change même de casquette !
08h45 : Je ferme la porte de l’immeuble, je suis devant chez moi. Je prends le temps de manger mon sandwich de peanut butter / confiture (le 7ème de la journée). Nouvelle bonne nouvelle ! Une nouvelle inconnue, Natalia, se propose de venir courir 10km et m’attends au “jardim sá da bandeira”, à coté de Timeout Market. C’est parti mon kiki !
09h00 : Pile au moment où ma montre indique 09h00, je retrouve Natalia. On décide de repartir sur Belem.
09h35 : Il me faudra 1h30 pour faire 10km et atteindre la barre des 80km, soit une vitesse de 6.7 km/h. En clair, je ne suis pas loin d’une marche “dynamique” qu’on estime à 6,4 km/h. De toutes les façons, je ne peux pas faire mieux. Genre je suis au max du max (sans jeu de mots).
10h00 : 83km au compteur. Ma vitesse au kilomètre ralentie à vue d’oeil. J’ai des crampes violentes sur l’arrière des cuisses, les fesses et les mollets. Même le dessous de pieds commence à faire mal. Tous les voyants du tableau de bord clignotent. Le corps crie “Stop. Please. Stop.”
10h12 : Mon amie Margaud nous rejoint au kilomètre 84 pour courir 5km avec nous. Je pars dans un fou rire en imaginant ce que pensent les gens qui me regardent courir tel un zombie accompagné par ces deux jolies coaches : “oh regarde le pauvre, cela semble si dur pour lui, alors que pour les deux autres cela semble si facile. Il a pas l’air à l’aise avec la course à pied le jeune homme, faudrait pas qu’il force comme ça”. Et moi, dans ma tête, la petite voix qui hurle : “CA FAIT 10 HEURES QUE JE COURS PUTAIN !”
10h47 : Retour au Time Out Market pour déposer Natalia (qui doit prendre son train). On repart à l’est avec Margaud pour viser les 90km. Je ne peux plus parler ni réfléchir. Toute mon attention est dirigée vers mes jambes. Faire quelques mètres en trottinant, attendre que la douleur soit trop forte, marcher quelques mètres, attendre que la douleur soit tolérable, recommencer…
11h03 : Nous y sommes. Dernière ligne droite. Dernier 10km. C’est quoi 10km dans une course de 100km ? C’est quoi 10km dans une vie ? C’est rien 10km. Tu l’as déjà fait des centaines de fois Maxime…
11h32 : Margaud me quitte, je me retrouve seul “one last time”. Je mets mes airpods et lance un mix electro de Pretty Pink. J’ai besoin d’un tempo qui va vite, avec des grosses basses. À ce moment là, je ne sais pas que je suis à quelques mètres m’effondrer physiologiquement…
95km à 100km : voyage au bout de soi-même
11h50 : J’approche des 12 heures d’effort. Une putain de journée ! L’équivalent d’un Paris – Los Angeles. Quand ma montre sonne pour la 95ème fois, pour annoncer le 95ème kilomètre, je m’effondre en larmes. Je n’en peux littéralement plus. Je ne peux plus courir, je ne peux plus marcher et je ne peux même pas rester debout à cause de la douleur sur l’ensemble des mes jambes. Je pleure car je commence à imaginer l’échec. Le pire des échecs. Échouer à 5km de l’arrivée…
11h59 : Je reçois des dizaines de messages sur instagram et whatsapp. Les gens voient que je suis en train de flancher. Chaque petit message et note vocales me redonne un petit boost d’énergie. Mon ami Badr me dit : “Mec, il est juste hors de question que tu abandonnes à 5km de la fin, alors tu arrêtes de te focaliser sur la ligne d’arrivée et concentre toi sur les 100 prochains mètres. Cours 100m, marche 100m. Chaque bloc de 200m est un succès en soi. Oublie les 5km restants, concentre toi sur les 200 prochains mètres”. Chef Oui Chef!
12h08 : Kilomètre 97. Plus que 3. je retrouve un regain d’énergie à l’approche de la ligne d’arrivée. Petit à petit, je sors de l’ombre pour retrouver une lueur d’espoir, je vois le bout du tunnel ! Je me rends compte que c’est maintenant « quasiment sûr » que je vais y arriver. Je ne vois pas ce qui pourrait se passer en 3 kilomètres. Go Max Go !
12h17 : Kilomètre 98. Je pleurs, je suis dans tous les états. Je passe de la joie à la tristesse, comme dans une montagne russe sans fin. Mon corps est complètement shooté à la douleur et aux endorphines. Je ne vois pas plus loin que le bout de mes pieds. Je compte dans ma tête jusqu’à 10, puis je marche. Je recompte jusqu’à 10, puis je cours.
12h26 : Kilomètre 99. Oh My God, this is happening ! Je vais réussir l’impossible !
12h35 : Kilomètre 100. Le bip final de ma Garmin. Le 100ème bip de la journée. Le bip de la délivrance. Je regarde ma montre sauvegarder ma course. Une pensée horrible traverse mon esprit : “imagine la montre plante et la course ne s’enregistre pas!”. Heureusement, l’écran change et me montre l’exploit en 4 chiffres : 12 heures et 35 min de course, 100km parcourus, 7:33/km de vitesse moyenne et 7000 calories brulées pendant l’effort.
100km + 30min : la peur de ma vie
Juste après m’être assuré que la course était sauvegardé sur ma Garmin, je me suis assis le long du trottoir. Mais d’un coup, mon esprit a commencé paniquer J’ai senti que mon corps était en train de se mettre en veille tout seul et que j’étais au milieu de la rue…
Je me dépêche de rentrer chez moi, je monte les 10 marches qui me séparent de mon appartement, je tourne la clef et je m’assois sur le canapé. Je prends terriblement peur. Je ne comprends pas ce qui se passe. Comme si toutes les fonctions vitales de mon corps étaient en train de s’éteindre toutes seules, les unes après les autres. Mon corps se met à trembler tout seul, j’ai les dents qui claquent, j’ai la chair de poule.
« Ok Max, si tu tombes dans le coma maintenant, tu es seul chez toi, tu peux mourir. Focus ».
J’appelle mon amie Brianna et je lui demande de rester en video-call avec moi, le temps de voir ce qui se passe. Je pleure, je tremble, je grelotte. C’est juste horrible. J’ai si froid… Entendre quelque me parler me fait du bien. Je vais rester des longues minutes, inerte sur le canapé, en position latérale de sécurité, dans l’obscurité de mon appart. Oui, le soleil est déjà couché.
Au bout de 30min, j’utilise mes dernières ressources pour me déshabiller et aller prendre une douche chaude, qui me fera un bien fou. 60min après avoir ouvert la porte, je reprends enfin mes esprits. La peur est passée. Je me fais réchauffer un plat de pâtes.
22h00. Je me mets au lit en réalisant deux choses : l’incroyable aventure que je viens de vivre (Merci mon corps!) et que la nuit va être compliquée (j’ai des crampes quelque soit ma position dans le lit)
Conclusion ? Prochain challenge ?
Ce nouveau rêve réalisé montre une nouvelle fois que « tout est possible ». Que nous n’avons pas de limite, à la fois physique et mentale. L’humain est vraiment un phénomène de la nature incroyable, qui ne cesse d’évoluer (pour le pire comme pour le meilleur) depuis des millénaires.
Quand je regarde ma bucket list et ses +70 rêves réalisés depuis le 1er janvier 2020, je me rends vraiment compte à quel point nous n’avons pas de limite : faire l’ascension du Mont Blanc, lire 65 livres en une année, biker-Packer seul en Nouvelle-Zélande pendant 1200km de vélo, apprendre une 3ème langue ou encore passer 4 jours dans la jungle mexicaine sans parler ni boire ou manger.
Et encore une fois, ce challenge démontre la force de ma méthode (disponible ici). Si vous enlevez la motivation de l’équation, que vous définissez un objectif mesurable et le système « des petites victoires » associé, alors vous pouvez littéralement tout atteindre. Même vos rêves les plus fous.
Chacun étant unique et différent, pour certains « courir 100km » peut demander une année de préparation ou plus, mais je vous garanti que si vous courez un peu chaque jour, au bout d’un moment, vous serez prêt à prendre le départ d’un 100km.
Et donc ? On fait quoi après un 100km ?
On peut passer à la catégorie supérieure : « Courir 100 miles (160km) ». Mais on va couper court tout de suite. Je n’ai pas envie, mais alors PAS DU TOUT envie, de repartir sur un challenge d’endurance.
Au moment où j’écris ces lignes, 1 semaine pile après ma course, j’ai remis les chaussures pour un petit 10km sous le soleil de Lisbon. J’ai pris du plaisir, je me sentais bien mais 10km était largement suffisant. Je ne me vois pas redonner à la course à pied autant d’importance dans mes journées que sur les 4 derniers mois.
Courir 10 à 20km par jour impacte votre vie bien plus qu’on le pense. Par exemple, quand vous devez courir 20km dans la journée, il faut réfléchir à quel moment sera l’entrainement, donc il faut organiser le reste autour. Il faut réfléchir à ce que vous allez manger, savoir si cela va être suffisant. Il faut réfléchir aussi à l’heure du coucher, donc préparer sa soirée en fonction. 20km représente environ 2h00 de course, auquel il faut rajouter les 15min avant et facile 30 min après, soit pratiquement 3 heures au total. Sans oublier la fatigue physique et mental sur le reste de la journée. En d’autres mots, votre vie tourne autour, et non le contraire.
Donc il est temps pour moi de passer à autre chose. Un autre challenge physique. Je vous l’annonce dans quelques jours sur ma newsletter (disponible ici). Et oui il est déjà trouvé. Allez je suis sympa, je vous donne le titre : « Prochain challenge : courir (très) vite et soulever (très) lourd » !